Faire son plein pour moins de 1€ le litre : la promesse des boîtiers de conversion au bioéthanol | LE FIGARO

16 octobre 2021

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Écologique et économique, rouler au superethanol-85 semble être la solution miracle. Mais qu'en est-il vraiment ?

Face aux hausses de prix des carburants qui minent le pouvoir d'achat des Français, certains se tournent vers l'éthanol, un biocarburant produit en France grâce à la fermentation des sucres et de l'amidon contenus dans sles betteraves sucrières ou les céréales. Et pour cause, le prix du litre de superéthanol-85 est de 70 centimes, contre 1,534 euro pour le gazole, 1,69 euro pour le SP98 et 1,63 euro pour le SP95, selon les derniers chiffres du ministère de la Transition écologique. Si ce biocarburant conduit à une hausse de la consommation d'environ 20%, il reste donc bien plus rentable que l'essence ou le diesel, et séduit de plus en plus.

Pour rouler au bioéthanol en toute légalité, il est d'abord possible d'acheter un véhicule directement compatible, mais les offres sont rares en France. Les marques américaines Ford ou Jaguar-Land Rover sont les principales à proposer des gammes éthanol aux côtés de leurs gammes Diesel ou Essence.

L'autre solution, plus facile à adopter à court terme, est l'installation un boîtier de conversion homologué sur votre véhicule essence. Celui-ci vous permettra de remplacer votre carburant SP95 ou SP98 par du superéthanol-85. Pour cela, il vous faudra d'abord vérifier que votre véhicule est compatible auprès d'une des marques homologuées, puis prendre rendez-vous chez un garagiste agréé pour le faire poser. L'installation prend généralement 24 heures. Attention si votre boîtier n'est pas homologué, votre assurance pourrait refuser de vous indemniser en cas d'accident. Les solutions de reprogrammation du moteur existant sont aussi illégales.

Economique, écologique, et produit en France

Aujourd'hui en France, on compterait ainsi 39.000 véhicules FlexFuel d'origine et 105.000 boîtiers installés selon les chiffres du Syndicat national des producteurs d'alcool agricole. Le marché est anecdotique par rapport aux près de 40 millions de véhicules en circulation en France, mais il progresse rapidement, porté par deux arguments : des économies importantes et un impact écologique réduit. La société FlexFuel Energy Development, qui vend des boîtiers de conversion à l'éthanol, rapporte ainsi une augmentation de ses ventes de +37% depuis le début de l'année. Biomotors, autre acteur sur le marché, vend de son côté «1500 boîtiers tous les mois, avec une hausse de 40% cette année».

Alexandre, utilisateur convaincu, en est déjà à sa deuxième conversion et les économies sont significatives : «un plein d'essence me coûtait 65 € contre 25 € pour un plein d'éthanol», explique-t-il enthousiaste. La pose du boîtier lui a par ailleurs coûté 790 €, desquels il a pu déduire les aides de la région Hauts-de-France qui finance la conversion à hauteur de 40%. Selon lui, «l'investissement est donc remboursé en 10 pleins». Béatrice, équipée depuis mai 2021, n'a pas reçu d'aides de la région Normandie, mais avec une économie de 40€ par plein pour un investissement initial de 800€, elle ne regrette pas son choix. «Je fais 600km avec 30€» explique-t-elle au Figaro.

Pour Biomotors, les prix varient entre 900€ et 1300€, selon le directeur général, Alexis Landrieu. Autre argument économique : certaines régions proposent des aides. Comme mentionné plus haut, les Hauts-de-France financent la conversion à hauteur de 40%, le Grand Est propose aussi une aide de 500 €.

Le bioéthanol présente enfin l'avantage de l'écologie. Selon les fondateurs de FlexFuel et de Biomotors, l'installation d'un boîtier de conversion permet une réduction de 70% des émissions de gaz à effet de serre et de 90% des émissions de particules. Pour Alexandre, cela a aussi motivé son achat : «Je suis assez peu convaincu par les véhicules électriques et le bioéthanol me semble être une alternative intéressante. On ne brûle pas d'énergies fossiles et il n'y a pas le problème des batteries». Enfin, la France est le premier producteur européen de bioéthanol et cette filière représente aujourd'hui 9000 emplois selon le SNPAA.

Trop beau pour être vrai ?

Des boîtiers pour rouler avec un carburant écologique, produit en France et qui permettrait de faire d'importantes économies ? Le portrait semblerait presque trop beau pour être vrai. Toutefois, certains points d'attention sont à considérer. D'abord, il n'existe qu'environ 2500 stations essences proposant du bioéthanol en France, sur les 11.000 stations que compte le territoire national, tous carburants confondus. Mais cela ne semble pas poser problème aux usagers : «Avec un boîtier on peut rouler à l'éthanol mais aussi au SP95 ou 98 et alterner comme on le souhaite. Quand je ne trouve pas de superéthanol-85, je fais juste le plein au sans-plomb», sans les économies donc, explique Alexandre usager d'un boîtier. Pour Patrick, qui habite à côté de Sancerre, «il n'y a aucun souci : j'ai cinq stations disponibles dans un rayon de 20 kilomètres».

Par ailleurs, plusieurs utilisateurs font état de difficultés à démarrer l'hiver : «Ma voiture a parfois du mal à démarrer quand il fait froid, il faut tourner la clé deux ou trois fois pour que la combustion à froid se fasse» raconte Alexandre. Béatrice a aussi du mal à démarrer depuis que les températures baissent : «Je dois m'y prendre plusieurs fois, mais le garage m'a proposé de repasser gratuitement pour faire un réglage qui facilitera le démarrage» nous raconte-t-elle, confiante. Patrick a trouvé la parade : «Avec mon véhicule hybride, c'est le moteur électrique qui est sollicité au démarrage, je n'ai donc pas de problème. Quand l'éthanol prend le relais, le moteur est déjà chaud».

Certains utilisateurs se posent aussi la question du caractère corrosif de l'E85. Si les marques de boîtiers de conversion se veulent rassurantes, la garantie constructeur est suspendue sur toutes les pièces en contact avec le superéthanol-85, dès l'installation du dispositif. Les entreprises qui vendent ces boîtiers sont cependant contraintes par la réglementation de garantir toutes ces pièces à l'utilisateur, pour compenser la perte de la garantie constructeur. Alexis Landrieu, directeur général de Biomotors l'assure : «Il n'y a aucun risque pour le véhicule, les boîtiers homologués ont été testés par l'UTAC, un organisme missionné par l'État».

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